Le Devoir vient de publier un article qui démontre encore une fois qu’au niveau politique, la guerre de Sept Ans demeure un sujet assez tabou au Canada (lire l'article ici). Toutefois, j'aimerais souligner que ce qui me décontenance le plus sont les commentaires qui suivent cet article. Décidément, le silence que s'impose le Canada sur la Conquête ne fait que donner libre cours à la prolifération des interprétations basées sur la mémoire populaire, et non sur l'histoire.
Tant dans ces commentaires que sur Facebook, on y trouve des critiques qui ne parlent que des crimes de guerres britanniques. Pourtant, la réalité est que la France s'est permise autant sinon plus de libertés pendant cette guerre. Les gens qui s'amusent à se choquer des atrocités commises par, disons par exemple, les Rogers' Rangers, vont du même coup se plaire à oublier les massacres commis par les Canadiens, par exemple les hommes de Belestre, le long des colonies britanniques.
Ce mutisme sur la question de cette guerre ne fait qu'aggraver la discorde. Qu'on soit souverainiste ou fédéraliste n'est pas la question: la question est que le public doit avoir accès aux informations récentes sur cette guerre qui marque toujours son imaginaire. Ouvrir la voie au dialogue entre le public et les historiens permettrait d'aller au-delà du nombrilisme du Québec et de remettre cette guerre dans son contexte plus large. Il faut se rappeler que le Canada n'était pas le seul territoire affecté par cette guerre. Il faut également se rappeler que la France n'était pas plus angélique que l'Angleterre en matière de guerre et de déportation. D'ailleurs, a-t-on si facilement oublié que se promenait à Versailles un mémoire qui ne proposait rien de moins que l'abandon du Canada et la déportation forcée des Canadiens vers la Louisiane? Comme si la population du Saint-Laurent n'était rien de plus qu'un cheptel à déménager au gré des puissants...
Bref, c'est ce double standard dans la mémoire populaire qui m'irrite. Oui, le sort de la Nouvelle-France était inévitable devant le rouleau compresseur britannique. Oui, la population a souffert atrocement (rappelons qu’au moins un Canadien sur dix est mort à cause de cette guerre). Mais n’empêche que la faction du public qui décrie les actions britanniques réduit la complexité de cette guerre à une simple caricature, les « bons » contre les « méchants ». Rares sont les guerres aussi simples.
Comme écrivait Louise Dechêne, « toutes les guerres sont atroces, hier comme aujourd'hui ». Cela va de même d'un côté comme de l'autre d'un conflit.
Massacre at Sabbath Day Point (1757). Par Mark Churms. |
Très bien dit. En effet ils y avaient plusieurs acteurs dans cette guerre et tous étaient fautifs, la guerre c'est la guerre.
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