30 March 2014

Un premier tatouage!

Un peu de vanité? Peut-être. Le tatouage que vous voyez ci-haut est un cadeau de la part de mon frère Philippe pour mes trente ans et pour commémorer la fin de ma maîtrise après quatre longues années d’exploration. Effectivement, j’ai passé les dernières années à sillonner l’Amérique du Nord, du Québec au Michigan, de l’Illinois à la Louisiane, sur les traces de mes sujets d’étude. Je ressentais donc un besoin pressant de célébrer l’aboutissement de cette aventure avec une commémoration spéciale.

Ma décision de me faire tatouer était en même temps le point culminant de trois ans de réflexions. J’admirais le travail d’Arnaud Balvay au sujet du tatouage en Nouvelle-France. En lisant sa recherche, je me trouvais enclin à partager l’expérience de ces officiers qui se sont fait « piqués » par les Amérindiens. Comme l’écrit Balvay :
Le tatouage est […] une marque, un stigmate qui rappelle au tatoué son appartenance au groupe social. Comme l'a écrit Pierre Clastres, « la marque est un obstacle à l'oubli, le corps lui-même porte imprimées sur soi les traces du souvenir, le corps est une mémoire (...) La marque dit assurément leur appartenance au groupe: "Tu es des nôtres et tu ne l'oublieras pas" » C'est pour cette raison que le tatouage joue un rôle important dans les relations franco-amérindiennes. (Arnaud Balvay, L’Épée et la Plume : Amérindiens et soldats des troupes de la marine en Louisiane et au Pays d’en Haut (1683-1763), Thèse de Doctorat, Université Laval et Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2004, p.191)
Bref, je sentais déjà un besoin de souligner mon dévouement à l’histoire de ces gens. Je ressentais que me faire tatouer me rapprocherait d’eux de quelque manière personnelle…
Mais voilà la question qui tue : quoi me faire faire? Quelque chose d’époque? Mais quoi? Comme l’écrit Balvay :
Si tous les observateurs évoquent les tatouages, et surtout la façon dont ils sont réalisés, rares en revanche sont les illustrations de motifs représentés. Cependant, il semble que la symbolique de ces tatouages emprunte principalement ses représentations à la faune et à la flore. Les serpents, les lézards, les écureuils, les tortues ainsi que des fleurs ou des feuilles forment avec d'autres éléments naturels comme le soleil ou la lune l'ensemble des images tatouées. L'arrivée des Européens fait évoluer ces motifs de telle sorte que lorsque Diéreville visite l'Acadie en 1708, il voit de nombreux tatouages amérindiens dont les motifs sont d'inspiration européenne. (Balvay, p. 189).
Mais je n’ai jamais réussi à tomber sur une image d’époque que j’aimais. En fin de compte, je revenais toujours à cette image. Le lecteur assidu de mon blogue va sans doute reconnaître qu’il s’agit du logo de la commémoration du 250e anniversaire de la guerre de Sept Ans par l’État de la Pennsylvanie (http://www.warforempire.org/). Comme vous vous souviendrez d’un article précédent sur ce blogue, je louais la beauté et la simplicité de ce design évocateur.

Ainsi donc, le 8 avril dernier à La Suite, surmontant une dernière hésitation, je laissais mon tatoueur me « piquer » à mon tour. Malgré ma phobie de tout ce qui est aiguille et seringue, j’ai cru bon que mon dévouement à la mémoire de la Nouvelle-France et de ceux qui l’ont défendu soit plus important que mes peurs. J’ai tenté d’imiter l’officier Bossu, qui écrivait au sujet de son tatouage chez les Arkansas : « Je me suis prêté de bonne grâce à cette opération douloureuse » (Balvay, p. 195).

Voilà donc le résultat, après une heure et demie de douleur!

Et pourtant, je songe déjà à mon prochain pour la fin du doctorat…


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