22 May 2012

Pour le meilleur, et sans doute pour le pire...


Un mariage se célèbre par amour entre fiancés. Du moins, idéalement… C'est pourtant rarement le cas en Nouvelle-France! Effectivement, on se marie souvent pour obtenir un gain fiscal quelconque et pour avoir un soutien mutuel. Si l’amour naît dans le couple, tant mieux; sinon, tant pis. L’union par le mariage est sacrée, même lorsque les mariés se lancent des sacres! Voici un exemple croustillant nous venant de la Louisiane.

Le 6 septembre 1760, le dénommé Louis de Populus, écuyer et sieur de Saint-Protait, signe devant notaire son contrat de mariage à la dame Jeanne Kerrourette [Kerouret], veuve de Nicolas Aubert Dumont. Les biens de l’épouse s’ajoutent à ceux de l’époux, à la condition qu'ils ne servent pas à repayer les dettes de ce dernier. Également, une clause stipule qu’aucun esclave de la dame Kerrourette ne pourra être vendu par son mari sans sa permission. D’ailleurs, on y trouve l'instruction que la fidèle esclave dénommée La Mirre sera libérée à la mort de sa maîtresse, et qu’elle aura droit à une subsistance à base de maïs pour le reste de ses jours. Enfin, du total des biens que l’épouse apporte au bien commun, elle se réserve 6000 livres à dépenser à sa guise.

Toutefois, il faut à peine plus d’un an avant que leur relation se détériore au point de rupture. Une pétition est présentée au Conseil supérieur de la Nouvelle-Orléans. Les deux mariés sont apparemment « incapables de vivre paisiblement ensemble », ont des « tempéraments incompatibles » et « l’un est le fardeau de l’autre ». Le sieur Populus et la dame Kerrourette sont donc d’accord de se séparer. En fait, l’époux vient d’acheter la maison du sieur Dubroca, son voisin, afin d’y loger son épouse. Les deux terrains étant séparés par une clôture de piquets, chacun des deux malheureux mariés accepte de ne mettre le pied chez l’autre, même en son absence. Afin d’avoir la sainte paix, le sieur Populus accorde également 1200 livres par année à sa femme ainsi que quinze cordées de bois, quarante tonneaux de maïs et 450 livres de farine par année. La dame aura à sa disposition trois serviteurs (lire : esclaves noirs) et quatre vaches (qui demeurent toutefois sa propriété). Il s’engage de plus à défrayer tous frais médicaux potentiels qu'elle pourrait subir. Les meubles et le linge sont divisés. Enfin, bien que les deux ne puissent plus se sentir, ils sont toujours techniquement mariés et le sieur Populus demeure le propriétaire du bien commun. 

Malheureusement, nous ne savons pas si cupidon décidera éventuellement de remédier la situation… 

Sources : 
  • Louisiana State Museum Historical Center. French Translations, May 2 1761 – Dec 24 1761. Doc. 60 x3. Copy of Marriage Contract by Notarial Act, executed by and between Louis de Populus, Esquire, Sieur de St. Protait, and Dame Jeanne Kerrourette, widow by last marriage of Nicolas Aubert Dumont. Le 6 septembre 1760.
  • Louisiana State Museum Historical Center. French Translations, May 2 1761 – Dec 24 1761. Doc. 60 x2. Agreement of seperation of bed and Board. Le 7 octobre 1761.
  • Louisiana State Museum Historical Center. French Translations, May 2 1761 – Dec 24 1761. Doc. 60 x2. Petition for homologation. Le 7 octobre 1761.

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